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CP 03987 Marcel Proust à Léon Hennique [peu après le 11 décembre 1919]

Surlignage

44 rue Hamelin

Monsieur

Je sais vous nʼétiez pas un ami
de mes livres, le journal lʼEclair
ne lʼa pas caché. Mais comme cela
ne mʼempêche en rien dʼêtre lʼ-
admirateur des vôtres, jʼai
été très heureux de trouver votre
signature au bas de la lettre dont


Académie Goncourt a bien
voulu mʼhonorer. Je saisis
cette occasion probablement
unique pour moi de vous dire
que la magnifique traduction
que Mademoiselle Hennique a
faite de La Bien-Aimée de
Hardy a été pour bien souvent
pour moi une compagnie féconde
dans ma vie de souffrances physiques


et morales. Souvent je me crois, par la
pensée, dans lʼIle qui résonne du bruit
des carriers.

Veuillez agréer Monsieur
lʼexpression de mes sentiments les
plus distingués

Marcel Proust


 
 
Surlignage
 

44 rue Hamelin

Monsieur

Je sais que vous nʼétiez pas un ami de mes livres, le journal lʼEclair ne lʼa pas caché. Mais comme cela ne mʼempêche en rien dʼêtre lʼadmirateur des vôtres, jʼai été très heureux de trouver votre signature au bas de la lettre dont


 

Académie Goncourt a bien voulu mʼhonorer. Je saisis cette occasion probablement unique pour moi de vous dire que la magnifique traduction que Mademoiselle Hennique a faite de La Bien-Aimée de Hardy a été bien souvent pour moi une compagnie féconde dans ma vie de souffrances physiques


 

et morales. Souvent je me crois, par la pensée, dans lʼIle qui résonne du bruit des carriers.

Veuillez agréer Monsieur lʼexpression de mes sentiments les plus distingués

Marcel Proust


  
  
 
Note n°1
Lʼallusion à un article de LʼÉclair (voir n2) situe cette lettre à [peu de jours après le 11 décembre 1919]. [PK]
Note n°2
Proust a lu dans LʼÉclair du jeudi 11 décembre 1919 un article de Gérault-Richard, « Les Trois Petits Tours du scrutin », selon lequel Léon Hennique a voté à chaque tour pour Les Croix de bois de Roland Dorgelès : « Les "Goncourt" se sont réunis hier chez Drouant […] Nʼassistaient pas à la réunion  : MM. Émile Bergerat et Lucien Descaves, qui votèrent par correspondance. […] Le scrutin terminé, le vote proclamé, les académiciens se laissèrent aller, en enfilant leurs pardessus, à quelques confidences. — Descaves et Bergerat ont voté à tous les tours pour Les Croix de bois , déclara Jean Ajalbert. — Mais, fit Léon Hennique, mais moi aussi. » [PK, FP, CSz]
Note n°3
Proust confond la fille du destinataire, Nicolette Hennique, avec celle de Paul Margueritte, lui aussi membre de lʼacadémie Goncourt. Ève Paul-Margueritte avait à cette date traduit deux romans de Thomas Hardy, The Well-Beloved (La Bien-Aimée, Paris, Plon-Nourrit, 1909) ainsi que A Pair of Blue Eyes (Deux yeux bleus, Paris, Plon-Nourrit, 1913). [PK, FP]
Note n°4
La Bien-Aimée a pour décor lʼÎle des frondeurs (« the Isle of Slingers »), version fictive de lʼÎle de Portland (Dorset, Angleterre). Dans La Prisonnière, le héros demande à Albertine : « Vous vous rappelez assez dans Jude lʼobscur, avez-vous vu dans La Bien-Aimée, les blocs de pierres que le père extrait de lʼîle venant par bateaux sʼentasser dans lʼatelier du fils où elles deviennent statues […] » (RTP, III, 878). [PK, FP]
Note
Roland Dorgelès 1919 Les Croix de bois
Note
Thomas Hardy 1909 La Bien-Aimée
Note
Thomas Hardy 1892-1897 The Well-Beloved
Note
Thomas Hardy 1872-1873 A Pair of Blue Eyes


Mots-clefs :prix Goncourt
Date de mise en ligne : October 28, 2022 09:04
Date de la dernière mise à jour : November 23, 2022 10:24
Surlignage

44 rue Hamelin

Monsieur

Je sais vous nʼétiez pas un ami
de mes livres, le journal lʼEclair
ne lʼa pas caché. Mais comme cela
ne mʼempêche en rien dʼêtre lʼ-
admirateur des vôtres, jʼai
été très heureux de trouver votre
signature au bas de la lettre dont


Académie Goncourt a bien
voulu mʼhonorer. Je saisis
cette occasion probablement
unique pour moi de vous dire
que la magnifique traduction
que Mademoiselle Hennique a
faite de La Bien-Aimée de
Hardy a été pour bien souvent
pour moi une compagnie féconde
dans ma vie de souffrances physiques


et morales. Souvent je me crois, par la
pensée, dans lʼIle qui résonne du bruit
des carriers.

Veuillez agréer Monsieur
lʼexpression de mes sentiments les
plus distingués

Marcel Proust


 
 
Surlignage
 

44 rue Hamelin

Monsieur

Je sais que vous nʼétiez pas un ami de mes livres, le journal lʼEclair ne lʼa pas caché. Mais comme cela ne mʼempêche en rien dʼêtre lʼadmirateur des vôtres, jʼai été très heureux de trouver votre signature au bas de la lettre dont


 

Académie Goncourt a bien voulu mʼhonorer. Je saisis cette occasion probablement unique pour moi de vous dire que la magnifique traduction que Mademoiselle Hennique a faite de La Bien-Aimée de Hardy a été bien souvent pour moi une compagnie féconde dans ma vie de souffrances physiques


 

et morales. Souvent je me crois, par la pensée, dans lʼIle qui résonne du bruit des carriers.

Veuillez agréer Monsieur lʼexpression de mes sentiments les plus distingués

Marcel Proust


  
  
 
Note n°1
Lʼallusion à un article de LʼÉclair (voir n2) situe cette lettre à [peu de jours après le 11 décembre 1919]. [PK]
Note n°2
Proust a lu dans LʼÉclair du jeudi 11 décembre 1919 un article de Gérault-Richard, « Les Trois Petits Tours du scrutin », selon lequel Léon Hennique a voté à chaque tour pour Les Croix de bois de Roland Dorgelès : « Les "Goncourt" se sont réunis hier chez Drouant […] Nʼassistaient pas à la réunion  : MM. Émile Bergerat et Lucien Descaves, qui votèrent par correspondance. […] Le scrutin terminé, le vote proclamé, les académiciens se laissèrent aller, en enfilant leurs pardessus, à quelques confidences. — Descaves et Bergerat ont voté à tous les tours pour Les Croix de bois , déclara Jean Ajalbert. — Mais, fit Léon Hennique, mais moi aussi. » [PK, FP, CSz]
Note n°3
Proust confond la fille du destinataire, Nicolette Hennique, avec celle de Paul Margueritte, lui aussi membre de lʼacadémie Goncourt. Ève Paul-Margueritte avait à cette date traduit deux romans de Thomas Hardy, The Well-Beloved (La Bien-Aimée, Paris, Plon-Nourrit, 1909) ainsi que A Pair of Blue Eyes (Deux yeux bleus, Paris, Plon-Nourrit, 1913). [PK, FP]
Note n°4
La Bien-Aimée a pour décor lʼÎle des frondeurs (« the Isle of Slingers »), version fictive de lʼÎle de Portland (Dorset, Angleterre). Dans La Prisonnière, le héros demande à Albertine : « Vous vous rappelez assez dans Jude lʼobscur, avez-vous vu dans La Bien-Aimée, les blocs de pierres que le père extrait de lʼîle venant par bateaux sʼentasser dans lʼatelier du fils où elles deviennent statues […] » (RTP, III, 878). [PK, FP]
Note
Roland Dorgelès 1919 Les Croix de bois
Note
Thomas Hardy 1909 La Bien-Aimée
Note
Thomas Hardy 1892-1897 The Well-Beloved
Note
Thomas Hardy 1872-1873 A Pair of Blue Eyes


Mots-clefs :prix Goncourt
Date de mise en ligne : October 28, 2022 09:04
Date de la dernière mise à jour : November 23, 2022 10:24
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