CP 01943 Marcel Proust à Robert de Montesquiou [peu après le 21 février 1909]
1
Cher Monsieur,
Je vous remercie mille fois des éblouis-
sants articles2, où la Sagesse
retentit
harmonieusement de plus de grelots que ne
ferait la Folie3. — .
Quant au pastiche
il
m’a semblé assez exact et je compte le
publier. Si je n’avais pas voulu au
début
le déclarer, c’est que je comptais alors
user assez librement de cette
signature, et
il avait été convenu que j’en garderais
l’incognito4. Au reste mes humbles ailes
n’avaient pas besoin
d’être reconnues de
vous, puisqu’elles faisaient voler une
louange et non une flèche, et vous
pouvez toujours être certain de n’avoir
anonymement de moi que des fleurs
(vous ne receviez pas très gentiment autrefois
mes hortensias5 !) et que pour des choses
hostiles, j’userais d’une voix distincte.
« Qui pour mieux frapper votre oreille Saurait s’élever, pareille A la rumeur d’une cité »Mais Dieu me garde de vous exprimer
jamais autre chose que l’admiration
et l’amitié que je ressens si vivement
et auxquelles j’espère bien rester
toujours fidèle. C’est un bonheur
pour moi, et surtout un honneur, si une publication peut
en porter la marque. Et cette raison suffirait à me faire
publier et avouer la Fête chez Montesquiou. Le pseudonyme
n’aurait plus d’ailleurs aujourd’hui de raison d’être. Je fais
chercher précisément un cadre pour votre portrait6 et espère
que je vais en trouver aussi joli que celui qui sʼorne mainte-
nant du merveilleux Versailles d’Helleu7. Merci encore
cher Monsieur pour les articles, j’espère aller mieux
et vous voir alors. Sans doute vous verrez dans des
Suppléments du Figaro de vieux pastiches que j’y ai
envoyés. Il est même possible que l’un paraisse
Samedi8. Ils ne sont pas fameux mais peut’être
vous amuseront cependant. Quant à un pastiche
de vous, c’est à dire nouveau9, si vous m’y autorisez,
il faudra que j’aille un peu mieux.
Marcel Proust
1
Cher Monsieur,
Je vous remercie mille fois des éblouissants articles2, où la Sagesse retentit harmonieusement de plus de grelots que ne ferait la Folie3.
Quant au pastiche
il m’a semblé assez exact et je compte le publier. Si je n’avais pas voulu au
début le déclarer, c’est que je comptais alors user assez librement de cette
signature, et il avait été convenu que j’en garderais l’incognito4. Au reste mes humbles ailes n’avaient pas besoin
d’être reconnues de vous, puisqu’elles faisaient voler unelouange et non une flèche, et vous pouvez toujours être
certain de n’avoir anonymement de moi que des fleurs (vous ne receviez pas
très gentiment autrefois mes hortensias5
!) et que pour des choses hostiles, j’userais d’une voix distincte.
« Qui pour mieux frapper votre oreille
Saurait s’élever, pareille
A la rumeur d’une cité »
Mais Dieu me garde de vous exprimer jamais autre chose que
l’admiration et l’amitié que je ressens si vivement et auxquelles j’espère
bien rester toujours fidèle. C’est un bonheurpour moi,
et surtout un honneur, si une publication peut en porter la marque. Et cette
raison suffirait à me faire publier et avouer la Fête chez Montesquiou. Le pseudonyme n’aurait plus d’ailleurs aujourd’hui
de raison d’être. Je fais chercher précisément un cadre pour votre portrait6 et espère que je vais en trouver aussi joli que celui qui sʼorne maintenant du merveilleux Versailles d’Helleu7. Merci encore cher Monsieur
pour les articles, j’espère aller mieux et vous voir alors. Sans doute vous
verrez dans des
suppléments du Figaro de vieux pastiches que j’y ai envoyés. Il est même
possible que l’un paraisse samedi8. Ils ne sont pas fameux mais peut-être vous amuseront cependant. Quant à un pastiche de vous, cʼest-à-dire nouveau9, si vous m’y autorisez, il faudra que j’aille un peu mieux.
Marcel Proust
Date de la dernière mise à jour : June 18, 2024 07:03
1
Cher Monsieur,
Je vous remercie mille fois des éblouis-
sants articles2, où la Sagesse
retentit
harmonieusement de plus de grelots que ne
ferait la Folie3. — .
Quant au pastiche
il
m’a semblé assez exact et je compte le
publier. Si je n’avais pas voulu au
début
le déclarer, c’est que je comptais alors
user assez librement de cette
signature, et
il avait été convenu que j’en garderais
l’incognito4. Au reste mes humbles ailes
n’avaient pas besoin
d’être reconnues de
vous, puisqu’elles faisaient voler une
louange et non une flèche, et vous
pouvez toujours être certain de n’avoir
anonymement de moi que des fleurs
(vous ne receviez pas très gentiment autrefois
mes hortensias5 !) et que pour des choses
hostiles, j’userais d’une voix distincte.
« Qui pour mieux frapper votre oreille Saurait s’élever, pareille A la rumeur d’une cité »Mais Dieu me garde de vous exprimer
jamais autre chose que l’admiration
et l’amitié que je ressens si vivement
et auxquelles j’espère bien rester
toujours fidèle. C’est un bonheur
pour moi, et surtout un honneur, si une publication peut
en porter la marque. Et cette raison suffirait à me faire
publier et avouer la Fête chez Montesquiou. Le pseudonyme
n’aurait plus d’ailleurs aujourd’hui de raison d’être. Je fais
chercher précisément un cadre pour votre portrait6 et espère
que je vais en trouver aussi joli que celui qui sʼorne mainte-
nant du merveilleux Versailles d’Helleu7. Merci encore
cher Monsieur pour les articles, j’espère aller mieux
et vous voir alors. Sans doute vous verrez dans des
Suppléments du Figaro de vieux pastiches que j’y ai
envoyés. Il est même possible que l’un paraisse
Samedi8. Ils ne sont pas fameux mais peut’être
vous amuseront cependant. Quant à un pastiche
de vous, c’est à dire nouveau9, si vous m’y autorisez,
il faudra que j’aille un peu mieux.
Marcel Proust
1
Cher Monsieur,
Je vous remercie mille fois des éblouissants articles2, où la Sagesse retentit harmonieusement de plus de grelots que ne ferait la Folie3.
Quant au pastiche
il m’a semblé assez exact et je compte le publier. Si je n’avais pas voulu au
début le déclarer, c’est que je comptais alors user assez librement de cette
signature, et il avait été convenu que j’en garderais l’incognito4. Au reste mes humbles ailes n’avaient pas besoin
d’être reconnues de vous, puisqu’elles faisaient voler unelouange et non une flèche, et vous pouvez toujours être
certain de n’avoir anonymement de moi que des fleurs (vous ne receviez pas
très gentiment autrefois mes hortensias5
!) et que pour des choses hostiles, j’userais d’une voix distincte.
« Qui pour mieux frapper votre oreille
Saurait s’élever, pareille
A la rumeur d’une cité »
Mais Dieu me garde de vous exprimer jamais autre chose que
l’admiration et l’amitié que je ressens si vivement et auxquelles j’espère
bien rester toujours fidèle. C’est un bonheurpour moi,
et surtout un honneur, si une publication peut en porter la marque. Et cette
raison suffirait à me faire publier et avouer la Fête chez Montesquiou. Le pseudonyme n’aurait plus d’ailleurs aujourd’hui
de raison d’être. Je fais chercher précisément un cadre pour votre portrait6 et espère que je vais en trouver aussi joli que celui qui sʼorne maintenant du merveilleux Versailles d’Helleu7. Merci encore cher Monsieur
pour les articles, j’espère aller mieux et vous voir alors. Sans doute vous
verrez dans des
suppléments du Figaro de vieux pastiches que j’y ai envoyés. Il est même
possible que l’un paraisse samedi8. Ils ne sont pas fameux mais peut-être vous amuseront cependant. Quant à un pastiche de vous, cʼest-à-dire nouveau9, si vous m’y autorisez, il faudra que j’aille un peu mieux.
Marcel Proust
Date de la dernière mise à jour : June 18, 2024 07:03