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CP 01939 Robert de Montesquiou à Marcel Proust le 21 février 1909

Surlignage

Pavillon des Muses.


Cher Marcel,

avec plaisir j’ai reçu
de vos nouvelles ; avec
regret, j’ai vu qu’elles
étaient loin de s’améliorer.
Hélas ! quand il s’agit
de vous, c’est le triste
correctif d’usage.
Ci-joints : le pastiche


 
dont vous vous décidez
(enfin !) à assumer
la paternité. Je m’
en réjouis, pour lui, comme
pour moi. Vous avez vu
la place que je lui fais
dans celui de mes livres
que j’appelle : Mon Livre.
Encore, deux articles,
(ou plutôt, bis in idem,)
que je vous donne.
Comme vous ne m’en
parlez pas,
 

2/

dans votre gentille
récapitulation des lec-
tures dernières que vous
me devez, j’en conclus
qu’il vous a échappé.
Et comme on n’en
saurait dire autant de
moi (car il est né de
mon dessein — et venu
de mes meilleurs) je
vous l’envoie.
Quant à ce que
vous pouvez, ou voulez
faire d’après moi,
je m’en rapporte à
votre talent, non moins
qu’à votre délicatesse ;

et je suis votre
fidèlement affectionné

Cte R. de M

Février. 09.


P.S.
Il me semble que ces
« Notables »
composent le plus
amusant de mes recueils en
prose ; et que des Essais tels que
Madame Mondaniténe sont
pas sans offrir quelque chose des
prédicateurs Louis Quatorziens
qui, du haut de la chaire,
montraient au doigt, la
brebis galeuse.
(J’aime aussi le Péril Doré,
inédit, celui-là.)

N.B.
Je sais qu’on vous a donné
mon portrait. Accordez-lui
le cadre !

21 Février 09




Surlignage
Pavillon des Muses.

Cher Marcel,

avec plaisir j’ai reçu de vos nouvelles ; avec regret, j’ai vu qu’elles étaient loin de s’améliorer. Hélas ! quand il s’agit de vous, c’est le triste correctif d’usage. Ci-joints : le pastiche   dont vous vous décidez (enfin !) à assumer la paternité. Je m’ en réjouis, pour lui, comme pour moi. Vous avez vu la place que je lui fais dans celui de mes livres que j’appelle : Mon Livre. Encore, deux articles, (ou plutôt, bis in idem,) que je vous donne. Comme vous ne m’en parlez pas,   dans votre gentille récapitulation des lectures dernières que vous me devez, j’en conclus qu’il vous a échappé. Et comme on n’en saurait dire autant de moi (car il est né de mon dessein — et venu de mes meilleurs) je vous l’envoie. Quant à ce que vous pouvez, ou voulez faire d’après moi, je m’en rapporte à votre talent, non moins qu’à votre délicatesse ;

et je suis votre fidèlement affectionné

Cte R. de M

Février 1909

P.S. Il me semble que ces « Notables » composent le plus amusant de mes recueils en prose ; et que des essais tels que Madame Mondaniténe sont pas sans offrir quelque chose des prédicateurs Louis Quatorziens qui, du haut de la chaire, montraient au doigt, la brebis galeuse. (J’aime aussi le Péril Doré, inédit, celui-là.)

N.B. Je sais qu’on vous a donné mon portrait. Accordez-lui le cadre !

21 février 1909

Note n°1
La date avec le quantième est inscrite après le post-scriptum. [PK]
Note n°2
Allusion au pastiche de Saint-Simon « Fête chez Montesquiou à Neuilly » signé du pseudonyme « Horatio » paru dans Le Figaro, 18 janvier 1904, p. 3, sous la rubrique « Salons Parisiens ». Voir la note 5 de la lettre de Montesquiou à Proust du [5 mai 1905] (CP 01200 ; Kolb, V, n° 63) et la lettre de Proust à Montesquiou du même jour (CP 01201 ; Kolb, V, n° 64). Montesquiou répond ici à la demande de Proust dans sa lettre précédente (CP 01936 ; Kolb, IX, n° 11). [PK, JA]
Note n°3
Allusion aux pages 143-144 du Chancelier de Fleurs (1908) dans lesquelles Montesquiou cite le portrait dʼYturri que Proust avait écrit dans son pastiche de Saint-Simon de 1904 (voir note 2). Voir la note 5 de la lettre de Proust à Montesquiou des [premiers jours de juillet 1908] (CP 01831 ; Kolb, VIII, n° 87). [PK, JA]
Note n°4
Dans sa lettre précédente datée du mardi [16 février 1909] (CP 01936 ; Kolb, IX, n° 11), Proust mentionnait plusieurs articles de Montesquiou sur la peinture (voir les notes 2, 3 et 4 de cette lettre). [JA]
Note n°5
Assemblée de Notables, recueil d’essais de Montesquiou que celui-ci vient d’envoyer à Proust. Bien qu’on y ait imprimé au verso de la page du titre « Published November 1908 », ce livre est annoncé dans la Bibliographie de la France, IIIe partie (feuilleton), p. 130, à la date du 15 janvier 1909, comme venant de paraître. [PK]
Note n°6
« Madame Mondanité et Monsieur Monde », chapitre XIII d’Assemblée de Notables. Ce texte avait dʼabord paru dans La Vie parisienne (10 et 17 août 1907). Voir la note 6 de la lettre de Proust à Montesquiou du [samedi 7? septembre 1907] (CP 01705 ; Kolb, VII, n° 152). [PK]
Note n°7
« Le Péril doré », titre du chapitre V du recueil. C’est la suite du chapitre IV, intitulé « Ne touchez pas à la Joconde ! ». Cet article avait paru dans Gil Blas le 13 janvier 1906. Montesquiou s’en prend à la comtesse René de Béarn (sans la nommer) d’avoir offert au musée du Louvre un cadre pour La Joconde. Un article paru dans La Chronique des Arts, « Le nouveau cadre de "La Joconde" » (13 janvier 1906, p. 11), avait révélé l’identité de la donatrice. Dans « Le Péril doré », elle est nommée. [PK]
Note n°8
Nouvelle allusion au geste de Mme de Béarn. Voir note 7. [PK]
Note
Marcel Proust Fête chez Montesquiou à Neuilly Le Figaro 18 janvier 1904
Note
Robert de Montesquiou Le Chancelier de Fleurs publisher 1908
Traduction
deux en un
Note
Robert de Montesquiou Assemblée de Notables 1909 publisher pubPlace
Note
Robert de Montesquiou Assemblée de Notables Madame Mondanité et Monsieur Monde 1909 publisher pubPlace
Note
Robert de Montesquiou Assemblée de Notables Le péril doré 1909 publisher pubPlace


Mots-clefs :amitiélecturespastiche
Date de mise en ligne : April 1, 2024 18:11
Date de la dernière mise à jour : September 12, 2024 15:45
Surlignage

Pavillon des Muses.


Cher Marcel,

avec plaisir j’ai reçu
de vos nouvelles ; avec
regret, j’ai vu qu’elles
étaient loin de s’améliorer.
Hélas ! quand il s’agit
de vous, c’est le triste
correctif d’usage.
Ci-joints : le pastiche


 
dont vous vous décidez
(enfin !) à assumer
la paternité. Je m’
en réjouis, pour lui, comme
pour moi. Vous avez vu
la place que je lui fais
dans celui de mes livres
que j’appelle : Mon Livre.
Encore, deux articles,
(ou plutôt, bis in idem,)
que je vous donne.
Comme vous ne m’en
parlez pas,
 

2/

dans votre gentille
récapitulation des lec-
tures dernières que vous
me devez, j’en conclus
qu’il vous a échappé.
Et comme on n’en
saurait dire autant de
moi (car il est né de
mon dessein — et venu
de mes meilleurs) je
vous l’envoie.
Quant à ce que
vous pouvez, ou voulez
faire d’après moi,
je m’en rapporte à
votre talent, non moins
qu’à votre délicatesse ;

et je suis votre
fidèlement affectionné

Cte R. de M

Février. 09.


P.S.
Il me semble que ces
« Notables »
composent le plus
amusant de mes recueils en
prose ; et que des Essais tels que
Madame Mondaniténe sont
pas sans offrir quelque chose des
prédicateurs Louis Quatorziens
qui, du haut de la chaire,
montraient au doigt, la
brebis galeuse.
(J’aime aussi le Péril Doré,
inédit, celui-là.)

N.B.
Je sais qu’on vous a donné
mon portrait. Accordez-lui
le cadre !

21 Février 09




Surlignage
Pavillon des Muses.

Cher Marcel,

avec plaisir j’ai reçu de vos nouvelles ; avec regret, j’ai vu qu’elles étaient loin de s’améliorer. Hélas ! quand il s’agit de vous, c’est le triste correctif d’usage. Ci-joints : le pastiche   dont vous vous décidez (enfin !) à assumer la paternité. Je m’ en réjouis, pour lui, comme pour moi. Vous avez vu la place que je lui fais dans celui de mes livres que j’appelle : Mon Livre. Encore, deux articles, (ou plutôt, bis in idem,) que je vous donne. Comme vous ne m’en parlez pas,   dans votre gentille récapitulation des lectures dernières que vous me devez, j’en conclus qu’il vous a échappé. Et comme on n’en saurait dire autant de moi (car il est né de mon dessein — et venu de mes meilleurs) je vous l’envoie. Quant à ce que vous pouvez, ou voulez faire d’après moi, je m’en rapporte à votre talent, non moins qu’à votre délicatesse ;

et je suis votre fidèlement affectionné

Cte R. de M

Février 1909

P.S. Il me semble que ces « Notables » composent le plus amusant de mes recueils en prose ; et que des essais tels que Madame Mondaniténe sont pas sans offrir quelque chose des prédicateurs Louis Quatorziens qui, du haut de la chaire, montraient au doigt, la brebis galeuse. (J’aime aussi le Péril Doré, inédit, celui-là.)

N.B. Je sais qu’on vous a donné mon portrait. Accordez-lui le cadre !

21 février 1909

Note n°1
La date avec le quantième est inscrite après le post-scriptum. [PK]
Note n°2
Allusion au pastiche de Saint-Simon « Fête chez Montesquiou à Neuilly » signé du pseudonyme « Horatio » paru dans Le Figaro, 18 janvier 1904, p. 3, sous la rubrique « Salons Parisiens ». Voir la note 5 de la lettre de Montesquiou à Proust du [5 mai 1905] (CP 01200 ; Kolb, V, n° 63) et la lettre de Proust à Montesquiou du même jour (CP 01201 ; Kolb, V, n° 64). Montesquiou répond ici à la demande de Proust dans sa lettre précédente (CP 01936 ; Kolb, IX, n° 11). [PK, JA]
Note n°3
Allusion aux pages 143-144 du Chancelier de Fleurs (1908) dans lesquelles Montesquiou cite le portrait dʼYturri que Proust avait écrit dans son pastiche de Saint-Simon de 1904 (voir note 2). Voir la note 5 de la lettre de Proust à Montesquiou des [premiers jours de juillet 1908] (CP 01831 ; Kolb, VIII, n° 87). [PK, JA]
Note n°4
Dans sa lettre précédente datée du mardi [16 février 1909] (CP 01936 ; Kolb, IX, n° 11), Proust mentionnait plusieurs articles de Montesquiou sur la peinture (voir les notes 2, 3 et 4 de cette lettre). [JA]
Note n°5
Assemblée de Notables, recueil d’essais de Montesquiou que celui-ci vient d’envoyer à Proust. Bien qu’on y ait imprimé au verso de la page du titre « Published November 1908 », ce livre est annoncé dans la Bibliographie de la France, IIIe partie (feuilleton), p. 130, à la date du 15 janvier 1909, comme venant de paraître. [PK]
Note n°6
« Madame Mondanité et Monsieur Monde », chapitre XIII d’Assemblée de Notables. Ce texte avait dʼabord paru dans La Vie parisienne (10 et 17 août 1907). Voir la note 6 de la lettre de Proust à Montesquiou du [samedi 7? septembre 1907] (CP 01705 ; Kolb, VII, n° 152). [PK]
Note n°7
« Le Péril doré », titre du chapitre V du recueil. C’est la suite du chapitre IV, intitulé « Ne touchez pas à la Joconde ! ». Cet article avait paru dans Gil Blas le 13 janvier 1906. Montesquiou s’en prend à la comtesse René de Béarn (sans la nommer) d’avoir offert au musée du Louvre un cadre pour La Joconde. Un article paru dans La Chronique des Arts, « Le nouveau cadre de "La Joconde" » (13 janvier 1906, p. 11), avait révélé l’identité de la donatrice. Dans « Le Péril doré », elle est nommée. [PK]
Note n°8
Nouvelle allusion au geste de Mme de Béarn. Voir note 7. [PK]
Note
Marcel Proust Fête chez Montesquiou à Neuilly Le Figaro 18 janvier 1904
Note
Robert de Montesquiou Le Chancelier de Fleurs publisher 1908
Traduction
deux en un
Note
Robert de Montesquiou Assemblée de Notables 1909 publisher pubPlace
Note
Robert de Montesquiou Assemblée de Notables Madame Mondanité et Monsieur Monde 1909 publisher pubPlace
Note
Robert de Montesquiou Assemblée de Notables Le péril doré 1909 publisher pubPlace


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Date de mise en ligne : April 1, 2024 18:11
Date de la dernière mise à jour : September 12, 2024 15:45
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