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CP 01783 Marcel Proust à la princesse de Caraman-Chimay [le samedi 4 avril 1908]

Surlignage

J’ai fané le nom de la demoiselle, parce
que vous en vous en moqueriez par le téléphone et
si c’était entendu cela détruirait des chances qui
n’existeront d’ailleurs jamais, de la voir, mais enfin une
possibilité. Si je vous vois je vous demanderai adroitement
si vous la connaissez, mais je suppose que non


Princesse

Je vous remercie de tout cœur
de votre intervention, de votre
lettre charmante. J’ai peur que
cela ne soit une fatigue pour
Madame de Noailles. Peutʼêtre
ai-je eu tort. De loin on imagine
mal, je croyais que vous voyiez Hervieu
tous les jours. Mais je pense que
maintenant ce que je pourrais faire
de plus compliqué serait de dire à


à Madame de Noailles de ne rien
faire et je laisse les choses aller.

Adieu Princesse, je vous remercie
bien profondément

Votre respectueux ami
Marcel Proust

Je vais envoyer des Ruskin à Ma-
dame Martel
puisque maintenant que
vous n’habitez plus dans la même
maison
je n’ai plus chance que vous
attiriez son attention sur moi. J’ai
aperçu l’autre jour une Mlle de
Goyon qui est encore bien préférable.
Mais je pense que vous ne la connaissez


pas ou vous ne vous en souciez pas non plus !
— . Je crois que je ne vous ai jamais raconté l’entrevue que
j’ai eue avec Hermant il y a un mois et les
discours que je lui tins sur la Discorde. Ce fut
beau, je vous assure. Très accessoirement sa colère contre
Madame Bulteau m’a incliné à une grande
estime de cette dame… Le fils d’Hermant est charmant
de politesse, de gentillesse, et beau garçon.

Surlignage

Princesse

Je vous remercie de tout cœur de votre intervention, de votre lettre charmante. J’ai peur que cela ne soit une fatigue pour Madame de Noailles. Peut-être ai-je eu tort. De loin on imagine mal, je croyais que vous voyiez Hervieu tous les jours. Mais je pense que maintenant ce que je pourrais faire de plus compliqué serait de dire àMadame de Noailles de ne rien faire et je laisse les choses aller.

Adieu Princesse, je vous remercie bien profondément.

Votre respectueux ami Marcel Proust

Je vais envoyer des Ruskin à Madame Martel puisque maintenant que vous n’habitez plus dans la même maison je n’ai plus chance que vous attiriez son attention sur moi. J’ai aperçu l’autre jour une Mlle de qui est encore bien préférable. Mais je pense que vous ne la connaissezpas ou que vous ne vous en souciez pas non plus !

Je crois que je ne vous ai jamais raconté l’entrevue que j’ai eue avec Hermant il y a un mois et les discours que je lui tins sur la Discorde. Ce fut beau, je vous assure. Très accessoirement sa colère contre Madame Bulteau m’a incliné à une grande estime de cette dame… Le fils d’Hermant est charmant de politesse, de gentillesse, et beau garçon.

J’ai fané le nom de la demoiselle, parce que vous en vous en moqueriez par le téléphone et si c’était entendu cela détruirait des chances qui n’existeront d’ailleurs jamais, de la voir, mais enfin une possibilité. Si je vous vois je vous demanderai adroitement si vous la connaissez, mais je suppose que non.

Note n°1
La présente lettre pourrait dater du [samedi 4 avril 1908] dʼaprès le cachet postal de lʼenveloppe associée (CP 90033) et suivre la lettre du même à la même de [peu avant le 4 avril 1908] (CP 01782 ; Kolb, XXI, n° 470). Voir Catalogue Marcel Proust. Deuxième partie : manuscrits, lettres, autour de Marcel Proust, Paris, Librairie Jean-Claude Vrain, 2022, p. 106. [PK, ChC]
Note n°2
Proust fait allusion à ses deux traductions de Ruskin parues aux éditions du Mercure de France : La Bible dʼAmiens (1904) et Sésame et les Lys (1906). [ChC]
Note n°3
Proust ayant « fané » le nom de la demoiselle, la lecture « Goyon » est incertaine (voir le post-scriptum en tête de la première page). Pendant ce printemps de 1908, Proust semble s’intéresser à Oriane de Goyon, nièce du duc de Feltre apparentée aux Albufera. Espérant faire sa connaissance, il se renseigne sur la jeune fille, notamment auprès de Louis d’Albufera (CP 01797 ; Kolb, VIII, n° 53). Elle lui sera présentée le 22 juin 1908 à la soirée chez la princesse Murat. Voir à ce propos les lettres que Proust écrit le même soir à Louis dʼAlbufera (CP 01821 ; Kolb, VIII, n° 77) et à Reynaldo Hahn (CP 01822 ; Kolb, VIII, n° 78). [ChC]
Note n°4
À propos d’Abel Hermant et de son fils adoptif, voir la lettre de Proust à Anna de Noailles de [peu après le 21 mars 1908] (CP 01774 ; Kolb, VIII, n° 30) : « Jʼai dit à la Princesse de Chimay que je lui raconterais – et à vous une conversation avec Hermant. Et combien jʼavais trouvé son fils gentil. Car je me refuse à croire à l’affreuse hypothèse ». [ChC]
Note
  • John Ruskin La Bible dʼAmiens. Traduction, notes et préface par Marcel Proust pubPlace publisher 1904
  • John Ruskin Sésame et les Lys. Traduction, notes et préface par Marcel Proust pubPlace publisher 1906
Note
Abel Hermant La Discorde pubPlace publisher 1907


Mots-clefs :éditionmondanités
Date de mise en ligne : March 14, 2024 11:19
Date de la dernière mise à jour : June 18, 2024 07:03
Surlignage

J’ai fané le nom de la demoiselle, parce
que vous en vous en moqueriez par le téléphone et
si c’était entendu cela détruirait des chances qui
n’existeront d’ailleurs jamais, de la voir, mais enfin une
possibilité. Si je vous vois je vous demanderai adroitement
si vous la connaissez, mais je suppose que non


Princesse

Je vous remercie de tout cœur
de votre intervention, de votre
lettre charmante. J’ai peur que
cela ne soit une fatigue pour
Madame de Noailles. Peutʼêtre
ai-je eu tort. De loin on imagine
mal, je croyais que vous voyiez Hervieu
tous les jours. Mais je pense que
maintenant ce que je pourrais faire
de plus compliqué serait de dire à


à Madame de Noailles de ne rien
faire et je laisse les choses aller.

Adieu Princesse, je vous remercie
bien profondément

Votre respectueux ami
Marcel Proust

Je vais envoyer des Ruskin à Ma-
dame Martel
puisque maintenant que
vous n’habitez plus dans la même
maison
je n’ai plus chance que vous
attiriez son attention sur moi. J’ai
aperçu l’autre jour une Mlle de
Goyon qui est encore bien préférable.
Mais je pense que vous ne la connaissez


pas ou vous ne vous en souciez pas non plus !
— . Je crois que je ne vous ai jamais raconté l’entrevue que
j’ai eue avec Hermant il y a un mois et les
discours que je lui tins sur la Discorde. Ce fut
beau, je vous assure. Très accessoirement sa colère contre
Madame Bulteau m’a incliné à une grande
estime de cette dame… Le fils d’Hermant est charmant
de politesse, de gentillesse, et beau garçon.

Surlignage

Princesse

Je vous remercie de tout cœur de votre intervention, de votre lettre charmante. J’ai peur que cela ne soit une fatigue pour Madame de Noailles. Peut-être ai-je eu tort. De loin on imagine mal, je croyais que vous voyiez Hervieu tous les jours. Mais je pense que maintenant ce que je pourrais faire de plus compliqué serait de dire àMadame de Noailles de ne rien faire et je laisse les choses aller.

Adieu Princesse, je vous remercie bien profondément.

Votre respectueux ami Marcel Proust

Je vais envoyer des Ruskin à Madame Martel puisque maintenant que vous n’habitez plus dans la même maison je n’ai plus chance que vous attiriez son attention sur moi. J’ai aperçu l’autre jour une Mlle de qui est encore bien préférable. Mais je pense que vous ne la connaissezpas ou que vous ne vous en souciez pas non plus !

Je crois que je ne vous ai jamais raconté l’entrevue que j’ai eue avec Hermant il y a un mois et les discours que je lui tins sur la Discorde. Ce fut beau, je vous assure. Très accessoirement sa colère contre Madame Bulteau m’a incliné à une grande estime de cette dame… Le fils d’Hermant est charmant de politesse, de gentillesse, et beau garçon.

J’ai fané le nom de la demoiselle, parce que vous en vous en moqueriez par le téléphone et si c’était entendu cela détruirait des chances qui n’existeront d’ailleurs jamais, de la voir, mais enfin une possibilité. Si je vous vois je vous demanderai adroitement si vous la connaissez, mais je suppose que non.

Note n°1
La présente lettre pourrait dater du [samedi 4 avril 1908] dʼaprès le cachet postal de lʼenveloppe associée (CP 90033) et suivre la lettre du même à la même de [peu avant le 4 avril 1908] (CP 01782 ; Kolb, XXI, n° 470). Voir Catalogue Marcel Proust. Deuxième partie : manuscrits, lettres, autour de Marcel Proust, Paris, Librairie Jean-Claude Vrain, 2022, p. 106. [PK, ChC]
Note n°2
Proust fait allusion à ses deux traductions de Ruskin parues aux éditions du Mercure de France : La Bible dʼAmiens (1904) et Sésame et les Lys (1906). [ChC]
Note n°3
Proust ayant « fané » le nom de la demoiselle, la lecture « Goyon » est incertaine (voir le post-scriptum en tête de la première page). Pendant ce printemps de 1908, Proust semble s’intéresser à Oriane de Goyon, nièce du duc de Feltre apparentée aux Albufera. Espérant faire sa connaissance, il se renseigne sur la jeune fille, notamment auprès de Louis d’Albufera (CP 01797 ; Kolb, VIII, n° 53). Elle lui sera présentée le 22 juin 1908 à la soirée chez la princesse Murat. Voir à ce propos les lettres que Proust écrit le même soir à Louis dʼAlbufera (CP 01821 ; Kolb, VIII, n° 77) et à Reynaldo Hahn (CP 01822 ; Kolb, VIII, n° 78). [ChC]
Note n°4
À propos d’Abel Hermant et de son fils adoptif, voir la lettre de Proust à Anna de Noailles de [peu après le 21 mars 1908] (CP 01774 ; Kolb, VIII, n° 30) : « Jʼai dit à la Princesse de Chimay que je lui raconterais – et à vous une conversation avec Hermant. Et combien jʼavais trouvé son fils gentil. Car je me refuse à croire à l’affreuse hypothèse ». [ChC]
Note
  • John Ruskin La Bible dʼAmiens. Traduction, notes et préface par Marcel Proust pubPlace publisher 1904
  • John Ruskin Sésame et les Lys. Traduction, notes et préface par Marcel Proust pubPlace publisher 1906
Note
Abel Hermant La Discorde pubPlace publisher 1907


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Date de mise en ligne : March 14, 2024 11:19
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