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CP 03692 Walter Berry à Marcel Proust le 22 janvier 1919

Surlignage

AMERICAN CHAMBER OF COMMERCE IN PARIS
INCORPORATED

3, RUE SCRIBE

32, Rue Taitbout

TEL. CENTRAL 24-14

OFFICE OF
THE PRESIDENT

Le 22 Jan 1919

Cher Ami

Je reçois à lʼinstant votre lettre que
lʼon mʼapporte de chez moi, et comme je dois
partir dans qq. minutes pour une réunion je
vous écris cinématographiquement.

Jʼavais Sherlock-Holmes-é la situation lʼautre
jour
en me disant : « ou il vole à un rendez-vous
dʼamour ou il est indisposé ». Vous voyez que
jʼai touché juste ! Combien je regrette que
cela va mal. Jʼen suis navré. Et tous ces
embêtements par-dessus le marché !
Enfin, puisquʼils sont là, il faut y faire
face.

Dabord : mais certainement, envoyez les ta-
pisseries, le canapé, etc, ici. Je serai en-
chanté de les montrer à mes amis, et à
dʼautres, si nécessaire. Et ils garderont


2

lʼincognito.

Quant au bail, nʼoubliez pas que la Paix nʼest
pas encore arrivée. Il faut attendre la fin
du Congrès. Mais comme vous voulez être
au mieux avec votre propriétaire il faudrait
régler cela le plus tôt possible. Dʼautre part
il faut quʼil sache que si vous lui réglez
ses trois ans tout de suite, vous exigerez le
droit de continuer dans vos pénates, au
moins pour un laps de temps raisonnable.

Je viens de téléphoner chez M. Hauser, mais
il nʼy est pas. Nous reprendrons cela de-
main
.

Quant à la dédicace, cher Ami, je ne
puis que vous dire que vous me faites un
plaisir très-grand en me proposant cela ;
et comme vous le dites, ca doit sûrement
être pour le Côté de Guermantes . Je suis


profondément touché, et bien heureux de posséder votre amitié.
Jʼen dirais bien plus long, mais on mʼattend pour partir.

Remettez vous bien vite, et croyez moi toujours

Votre dévoué

Walter Berry

Hélas, ce soir, il faut que jʼaille chez Cléopatre , — celle de
Gémier , malheureusement ! mais faites moi signe, voulez-vous,
sitôt que vous allez mieux ? Vendredi ?


 
 
Surlignage
 
AMERICAN CHAMBER OF COMMERCE IN PARIS INCORPORATED

32, Rue Taitbout
TEL. CENTRAL 24-14
OFFICE OF THE PRESIDENT

Le 22 janvier 1919

Cher Ami

Je reçois à lʼinstant votre lettre que lʼon mʼapporte de chez moi, et comme je dois partir dans quelques minutes pour une réunion je vous écris cinématographiquement.

Jʼavais Sherlock-Holmes-é la situation lʼautre jour en me disant : « ou il vole à un rendez-vous dʼamour ou il est indisposé ». Vous voyez que jʼai touché juste ! Combien je regrette que cela va mal. Jʼen suis navré. Et tous ces embêtements par-dessus le marché ! Enfin, puisquʼils sont là, il faut y faire face.

Dʼabord : mais certainement, envoyez les tapisseries, le canapé, etc., ici. Je serai enchanté de les montrer à mes amis, et à dʼautres, si nécessaire. Et ils garderont


 

lʼincognito.

Quant au bail, nʼoubliez pas que la Paix nʼest pas encore arrivée. Il faut attendre la fin du Congrès. Mais comme vous voulez être au mieux avec votre propriétaire il faudrait régler cela le plus tôt possible. Dʼautre part il faut quʼil sache que si vous lui réglez ses trois ans tout de suite, vous exigerez le droit de continuer dans vos pénates, au moins pour un laps de temps raisonnable.

Je viens de téléphoner chez M. Hauser, mais il nʼy est pas. Nous reprendrons cela demain.

Quant à la dédicace, cher Ami, je ne puis que vous dire que vous me faites un plaisir très grand en me proposant cela ; et comme vous le dites, ça doit sûrement être pour Le Côté de Guermantes . Je suis


 

profondément touché, et bien heureux de posséder votre amitié. Jʼen dirais bien plus long, mais on mʼattend pour partir.

Remettez vous bien vite, et croyez moi toujours

Votre dévoué

Walter Berry

Hélas, ce soir, il faut que jʼaille chez Cléopâtre, — celle de Gémier , malheureusement ! Mais faites-moi signe, voulez-vous, sitôt que vous allez mieux ? Vendredi ?


  
  
 
Note n°1
Allusion au jour où Berry rencontre Proust au Ritz au moment où celui-ci sent venir une crise. Voir la lettre à Berry du mardi soir [21 janvier 1919] (CP 03691 ; Kolb, XVIII, nº 10). [PK]
Note n°2
La Conférence de la paix de Paris, ouverte le 18 janvier 1919, se terminera seulement en août 1919. [FP]
Note n°3
Voir la lettre à Berry du [21 janvier 1919] (CP 03691 ; Kolb, XVIII, nº 10). Proust souhaite dédier à Walter Berry soit Pastiches et Mélanges, à paraître en juin 1919 aux Éditions de la NRF, soit Le Côté de Guermantes, dont Proust, à cette époque, ne possède que les premières épreuves. Il optera finalement pour Pastiches et Mélanges. [ChC, FP]
Note n°4
Il sʼagit dʼAntoine et Cléopâtre (c. 1607) de William Shakespeare, adaptée par Lucien Népoty (1885-1945) avec musique de Henri Rabaud (1873-1949), présentée au théâtre Antoine dirigé par Firmin Gémier (1869-1933), tel quʼannoncé dans Le Figaro du 9 janvier 1919, p. 3, à la rubrique « Courrier des théâtres ». J. Paul-Boncour consacrera quelques semaines plus tard un article de tête à ces « représentations shakespeariennes de M. Gémier », lequel avait fondé une Société Shakespeare en 1917 : « Shakespeare en France », Le Figaro, 14 février 1919, p. 1. — Voir aussi la réponse de Proust à la présente lettre, dans la nuit de mercredi à jeudi [22 au 23 janvier 1919] (CP 03694 ; Kolb, XVIII, nº 13, note 8). [PK, FP]
Note
Adresse rayée trois fois.
Note
Peu après la mi-janvier 1919.
Note
Marcel Proust 1920-1921 Le Côté de Guermantes


Mots-clefs :prix Goncourt
Date de mise en ligne : October 4, 2022 15:07
Date de la dernière mise à jour : November 29, 2022 10:01
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Cher Ami

Je reçois à lʼinstant votre lettre que
lʼon mʼapporte de chez moi, et comme je dois
partir dans qq. minutes pour une réunion je
vous écris cinématographiquement.

Jʼavais Sherlock-Holmes-é la situation lʼautre
jour
en me disant : « ou il vole à un rendez-vous
dʼamour ou il est indisposé ». Vous voyez que
jʼai touché juste ! Combien je regrette que
cela va mal. Jʼen suis navré. Et tous ces
embêtements par-dessus le marché !
Enfin, puisquʼils sont là, il faut y faire
face.

Dabord : mais certainement, envoyez les ta-
pisseries, le canapé, etc, ici. Je serai en-
chanté de les montrer à mes amis, et à
dʼautres, si nécessaire. Et ils garderont


2

lʼincognito.

Quant au bail, nʼoubliez pas que la Paix nʼest
pas encore arrivée. Il faut attendre la fin
du Congrès. Mais comme vous voulez être
au mieux avec votre propriétaire il faudrait
régler cela le plus tôt possible. Dʼautre part
il faut quʼil sache que si vous lui réglez
ses trois ans tout de suite, vous exigerez le
droit de continuer dans vos pénates, au
moins pour un laps de temps raisonnable.

Je viens de téléphoner chez M. Hauser, mais
il nʼy est pas. Nous reprendrons cela de-
main
.

Quant à la dédicace, cher Ami, je ne
puis que vous dire que vous me faites un
plaisir très-grand en me proposant cela ;
et comme vous le dites, ca doit sûrement
être pour le Côté de Guermantes . Je suis


profondément touché, et bien heureux de posséder votre amitié.
Jʼen dirais bien plus long, mais on mʼattend pour partir.

Remettez vous bien vite, et croyez moi toujours

Votre dévoué

Walter Berry

Hélas, ce soir, il faut que jʼaille chez Cléopatre , — celle de
Gémier , malheureusement ! mais faites moi signe, voulez-vous,
sitôt que vous allez mieux ? Vendredi ?


 
 
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Le 22 janvier 1919

Cher Ami

Je reçois à lʼinstant votre lettre que lʼon mʼapporte de chez moi, et comme je dois partir dans quelques minutes pour une réunion je vous écris cinématographiquement.

Jʼavais Sherlock-Holmes-é la situation lʼautre jour en me disant : « ou il vole à un rendez-vous dʼamour ou il est indisposé ». Vous voyez que jʼai touché juste ! Combien je regrette que cela va mal. Jʼen suis navré. Et tous ces embêtements par-dessus le marché ! Enfin, puisquʼils sont là, il faut y faire face.

Dʼabord : mais certainement, envoyez les tapisseries, le canapé, etc., ici. Je serai enchanté de les montrer à mes amis, et à dʼautres, si nécessaire. Et ils garderont


 

lʼincognito.

Quant au bail, nʼoubliez pas que la Paix nʼest pas encore arrivée. Il faut attendre la fin du Congrès. Mais comme vous voulez être au mieux avec votre propriétaire il faudrait régler cela le plus tôt possible. Dʼautre part il faut quʼil sache que si vous lui réglez ses trois ans tout de suite, vous exigerez le droit de continuer dans vos pénates, au moins pour un laps de temps raisonnable.

Je viens de téléphoner chez M. Hauser, mais il nʼy est pas. Nous reprendrons cela demain.

Quant à la dédicace, cher Ami, je ne puis que vous dire que vous me faites un plaisir très grand en me proposant cela ; et comme vous le dites, ça doit sûrement être pour Le Côté de Guermantes . Je suis


 

profondément touché, et bien heureux de posséder votre amitié. Jʼen dirais bien plus long, mais on mʼattend pour partir.

Remettez vous bien vite, et croyez moi toujours

Votre dévoué

Walter Berry

Hélas, ce soir, il faut que jʼaille chez Cléopâtre, — celle de Gémier , malheureusement ! Mais faites-moi signe, voulez-vous, sitôt que vous allez mieux ? Vendredi ?


  
  
 
Note n°1
Allusion au jour où Berry rencontre Proust au Ritz au moment où celui-ci sent venir une crise. Voir la lettre à Berry du mardi soir [21 janvier 1919] (CP 03691 ; Kolb, XVIII, nº 10). [PK]
Note n°2
La Conférence de la paix de Paris, ouverte le 18 janvier 1919, se terminera seulement en août 1919. [FP]
Note n°3
Voir la lettre à Berry du [21 janvier 1919] (CP 03691 ; Kolb, XVIII, nº 10). Proust souhaite dédier à Walter Berry soit Pastiches et Mélanges, à paraître en juin 1919 aux Éditions de la NRF, soit Le Côté de Guermantes, dont Proust, à cette époque, ne possède que les premières épreuves. Il optera finalement pour Pastiches et Mélanges. [ChC, FP]
Note n°4
Il sʼagit dʼAntoine et Cléopâtre (c. 1607) de William Shakespeare, adaptée par Lucien Népoty (1885-1945) avec musique de Henri Rabaud (1873-1949), présentée au théâtre Antoine dirigé par Firmin Gémier (1869-1933), tel quʼannoncé dans Le Figaro du 9 janvier 1919, p. 3, à la rubrique « Courrier des théâtres ». J. Paul-Boncour consacrera quelques semaines plus tard un article de tête à ces « représentations shakespeariennes de M. Gémier », lequel avait fondé une Société Shakespeare en 1917 : « Shakespeare en France », Le Figaro, 14 février 1919, p. 1. — Voir aussi la réponse de Proust à la présente lettre, dans la nuit de mercredi à jeudi [22 au 23 janvier 1919] (CP 03694 ; Kolb, XVIII, nº 13, note 8). [PK, FP]
Note
Adresse rayée trois fois.
Note
Peu après la mi-janvier 1919.
Note
Marcel Proust 1920-1921 Le Côté de Guermantes


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Date de mise en ligne : October 4, 2022 15:07
Date de la dernière mise à jour : November 29, 2022 10:01
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